16.03.2017

Élections COM 2017 : entretien avec Aline Hanson, tête de liste de Continuons pour Saint-Martin

Les élections territoriales pour désigner les 23 nouveaux membres du Conseil territorial de Saint-Martin auront lieu les dimanches 19 et 26 mars 2017. SoualigaPost a posé aux candidats douze questions identiques. Retrouvez aujourd’hui les réponses d'Aline Hanson.

1/ Comment se décide-t-on à se (re)présenter aux élections territoriales ?

Il faut vouloir s’engager dans la vie de la cité et avoir les convictions que son apport personnel et ses compétences peuvent être mis à profit, pour l’intérêt suprême de tous nos concitoyens. 

Gouverner n’est pas chose facile, les décisions qui sont prises sont parfois difficiles à faire accepter, mais elles doivent tenir compte de tous les paramètres.

Le renouvellement d’un mandat est aussi une décision pesée. Lorsque des actions ont été menées puis des procédures sont engagées, il n’est que normal que la reconduction d’un mandat soit établie pour enraciner le développement du territoire.

Un projet politique se décline sur le long terme, « Continuons pour Saint-Martin » a la volonté de poursuivre ce qui a été engagé ces 4 dernières années, notre projet s’inscrit donc, dans cette continuité.

2/ Aujourdhui, on parle beaucoup didentité saint-martinoise, le Saint-Martinois ayant en effet le sentiment de lavoir perdue. En tant que Saint-Martinois(e), partagez-vous ce constat ? Pensez-vous avoir perdu votre identité ?

Les traditions sont maintenues, et transmises aux générations. Le développement économique rapide et massif s’est opéré sans que le Saint-Martinois ait pu trouver sa place. Cependant les familles ont veillé à transmettre aux générations les fondements de la vie Saint-Martinoise. Les particularismes de Saint-Martin existent grâce à l’identité Saint-Martinoise. Notre historique et les caractéristiques de notre territoire sont cruciaux, car c’est ne ce sens que nous adaptons les politiques nationales.

Une tradition perdure par la langue de transmission, elle est toujours là et par conséquent rien n’est perdu. Il faut continuer à l’entretenir. Les personnes qui ont adopté Saint-Martin ont compris cela.

Nous sommes un territoire en avance dans le sens où nous savons vivre avec tout le monde à la condition que l’on respecte les us et coutumes du territoire d’accueil.

3/ Depuis plusieurs mois, certaines pensées peuvent être très nationalistes. Alors qu’en métropole, on dénonce ce genre d’idées en y voyant un danger pour la société, ici on aurait tendance à les entretenir. Selon vous, est-ce moins dangereux localement ?

Ce qui est dangereux c’est le regroupement des communautés, sans volonté de vivre ensemble.

 Ceux qui ont choisi de venir vivre à Saint-Martin respectent les fondements du territoire. Les Saint-Martinois sont français mais la langue maternelle est l’anglais. Cet anglais a permis aux différentes communautés de communiquer entre elles. Comme tout fondement il faut conserver le socle. L’intégration des personnes dans le territoire et le respect des coutumes du territoire apportent le développement harmonieux.

4/ On entend toujours que le développement économique doit être une priorité parce qu’il va permettre de créer des emplois, de la richesse, etc. Bien que la fiscalité soit attractive, rare sont les investisseurs intéressés à venir à Saint-Martin. Au regard des chiffres du chômage, toutes les actions menées jusqu’à aujourd’hui ont été un échec. Si vous êtes élue en mars, quels dispositifs allez-vous mettre en place pour créer des emplois ? Avec quel objectif ?

Dire que toutes les actions ont été un échec est inexact. La collectivité, l’état et les socioprofessionnels agissent quotidiennement pour l’emploi et le développement économique. Saint-Martin n’a pas été épargné par la crise économique mondiale et nous avons fait face ensemble.

L’aide à la création d’entreprise, les contrats aidés, la formation professionnelle, les emplois d’insertion, sont autant de dispositifs qui ont contribué ces derniers mois à la création d’emploi et qui montrent l’investissement des pouvoirs publics dans ce domaine. J’ajoute que la reprise économique est désormais perceptible, certains secteurs commerciaux se sont fortement développés en 5 ans, je pense à Hope Estate, Mont Vernon et Bellevue.

Notre projet de société est construit sur une décennie. Ces 4 dernières années, il a d’abord fallu stabiliser les finances de la collectivité et rattraper le retard structurel du territoire en créant des équipements de proximité pour le cadre de vie de nos concitoyens. Ce sont les bases de tout développement économique. Les fondations de la collectivité étant plus solides, cette nouvelle mandature va nous permettre d’agir plus fortement sur le développement économique et l’emploi.

Pour cela, nous avons choisi de privilégier les partenariats publics-privés et de travailler en concertation avec les socio-professionnels. La redynamisation de Marigot, l’aménagement de la baie de Marigot, la modernisation et l’augmentation du parc hôtelier, la charte que nous souhaitons signer avec les entreprises pour l’embauche des jeunes, sont des projets créateurs d’emplois.

J’ajoute que le rattrapage structurel va se poursuivre et que la commande publique est aussi génératrice d’emplois. Je veux aussi dire que tous les quartiers seront partie-prenante du développement économique, dans le cadre d’un contrat global pour Saint-Martin.

5/ En matière d’emploi plus précisément, nombreux sont ceux, dont vous, qui veulent donner la priorité aux Saint-Martinois. Ce qui peut sembler juste mais il faut être réaliste et admettre quil y a un manque de compétences localement, notamment pour les postes dencadrement. Comment, selon vous, est-il possible d’y remédier ? Comment peut-on former les jeunes et moins jeunes (salariés durant leur carrière pour quils puissent évoluer) sur le territoire ?

Donner la priorité aux originaires n’est pas un concept propre à Saint-Martin, chaque région surtout celles à forte identité culturelle, souhaite qu’une partie de leurs natifs reviennent au pays pour contribuer à l’économie et au maintien des traditions.

Je pars du principe que tout s’apprend, les évolutions de carrières et de compétences sont possibles dans tous les domaines et dans toutes les régions.

Il est vrai que lorsqu’on connaît son territoire, on se l’approprie et on adapte ses décisions.

Au sein de la collectivité, le plan de formation évolue et permet aux agents de se former et certains obtiennent les concours chaque année. C’est à partir des entretiens professionnels qu'il a été possible de déceler les formations nécessaires.

Cela étant en termes d’emploi, j’ai demandé dans toutes mes interventions aux entreprises d’employer les jeunes de l’île. Nos jeunes sont bons lors des stages, et ils ne seraient pas assez bons pour être employés… Or, c’est précisément l’intégration dans le monde économique qui permet de préserver la cohésion sociale. D’où mon idée de charte avec les entreprises.

Nul ne peut penser venir aux Antilles et ne pas contribuer au vivre ensemble des Antillais. J’ajoute que de plus en plus de jeunes saint-martinois suivent de longues études et reviennent diplômés, les compétences existent et vont se confirmer au fur et à mesure des années.

6/ En matière d’éducation, le constat dressé depuis plusieurs années est alarmant : le niveau est très bas. Pour plusieurs raisons : problème au niveau de la langue, manque dimplication des parents dans la scolarité de leurs enfants, etc. Selon vous, quel est le premier frein à la réussite de nos enfants ? Et comment peut-on le lever ?

Partons du positif, la collectivité a engagé ces dernières années d’importants montants dans le domaine qui la concerne à savoir la réfection des bâtiments afin d’améliorer le cadre des scolaires. Avec les partenaires de l’Education Nationale, et de l’Etat nous avons toujours pris à coeur la réussite de nos futurs citoyens.

Les parents sont le premier maillon à renforcer, et nous avons instauré le conseil des droits et devoirs des familles ainsi que l’école des Parents.

Cependant, n’oublions pas que Saint-Martin ce petit territoire accueille plus de 8700 élèves et certains parents méconnaissent le système éducatif de l’école où évoluent leurs enfants. D’autres manquent d’ambition pour leurs enfants.

Sur ce point qu’il faut agir en renforçant les actions de réussite éducative et de suivi des élèves par la mise en place d’équipes pluridisciplinaires (plusieurs acteurs des différents secteurs, centrés sur l’évolution de l’enfant). Agir aussi avec les outils existants : la collectivité a mis en place un schéma territorial numérique pour rompre avec la fracture numérique et mettre les nouvelles technologies au service des élèves.

L’enseignement en anglais est un levier important don’t nous devons poursuivre le développement, en partenariat avec l’Education Nationale. 

7/ Concernant l’aménagement de la baie de Marigot, le projet de la majorité actuelle semble ne pas avoir attiré de nombreux investisseurs. Certains en ont déjà tiré les leçons et veulent un projet à plus petite échelle. Quelle est votre position sur cet aménagement ?

Je dois aussi rappeler la réalité sur ce que vous appelez aujourd’hui projet de la majorité. Tout d’abord, c’est le projet de la Collectivité, qui a choisi de faire un appel à candidature suite au marché de définition de 2008 (autre majorité) qui avait abouti à un choix de concept. Les élus de ma majorité ont porté ce même projet jusqu’au bout et contrairement à ce qui se dit aujourd’hui, c’est un projet pour lequel le conseil territorial a défini à l’unanimité, donc majorité et opposition, les grandes lignes directrices (accueil de la moyenne croisière, accueil de la haute plaisance, hébergement touristique, animation touristique…). Mais surtout c’est un projet qui laisse une certaine souplesse aux investisseurs. Je rappelle également que le projet se fera par phases… et on devra dorénavant insister sur le phasage du projet. Encore une fois, tout le monde reste bloqué sur l’exemple de projet énorme issu du marché à définition, mais ce n’était qu’un exemple. Il faut expliquer plus les possibilités du projet pour qu’il soit mieux compris. Par les investisseurs, mais surtout par la population.

A la question pourquoi les investisseurs n’ont-ils pas répondu présents ? On a du revoir des éléments sur les derniers mois avec le changement de loi sur les appels à projets, et nous étions en période préélectorale qui n’est pas une période propice pour lancer des projets.

Pour répondre à la question est-il necessaire, l’aménagement de la baie de Marigot est indispensable, ne serait-ce que parce qu’il faut impérativement organiser les dessertes inter-îles et la plaisance, créer un quai d’accueil pour les yachts de croisière, et aménager la promenade du Front de mer. Il est indispensable pour donner un élan économique à notre capitale Marigot. Le projet de redynamisation du centre-ville va de pair, pour un aménagement global. Personne ne doit être laisse au bord de la route.

Ce projet d’aménagement doit non seulement correspondre aux attentes des investisseurs et être en parfaitement harmonie avec les besoins de Saint-Martin. Nous ferons en sorte que ce soit le cas.

8/ En matière fiscale, il est difficile pour la Collectivité de recouvrer lensemble des impôts. Il est aussi difficile pour les contribuables de sacquitter de l’impôt et autres taxes alors que durant des années, ils ne le faisaient pas. Les impayés ont rapporté plus de 20 millions deuros lan passé à la COM. Comment selon vous le système peut-il être plus performant ? Doit-on supprimer des taxes ? Baisser le taux de certaines pour inciter la population à les payer ?

J’entends qu’il faut reformer la fiscalité, la redresser, mais dans les faits, elle ne s’est jamais mieux portée que ces deux dernières années. En réalité, la pression fiscale est bien moins forte à Saint-Martin que dans la plupart des regions françaises : 40% d’abattement sur l’impôt sur le revenu, un impôt sur les sociétés abaissé à 20% par ma mandature. Ma majorité a également voté et prolongé la mesure d’exonération d’impôt sur les droits de succession pour permettre aux familles saint-martinoises de régler leurs problèmes d’indivision. Nous avons aussi créé les conditions d’une fiscalité attractive pour les investisseurs sur laquelle nous avons communiqué dans le guide “Doing Business in Saint-Martin”.

L’état a fait des efforts sur le recouvrement et l’élargissement de l’assiette fiscale et le civisme fiscal s’est amélioré. Nos concitoyens comprennent la nécessité de contribuer au développement du pays.

Bien sûr, nous devons poursuivre nos efforts pour garantir le principe d’égalité de traitement devant l’impôt et continuer la bataille pour obtenir une juste compensation du transfert de compétences.

9/ Depuis plusieurs années, l’écologie et dune manière plus large lenvironnement, prend une place de plus en plus importante dans le débat politique national et international. Il y a eu les Grenelles de lEnvironnement, puis récemment les Cop 21 et 22. Ici, à Saint-Martin, cest un sujet absent des débats. Ne pensez-vous pas pourtant que lenvironnement devrait être le dénominateur commun à toutes les actions réfléchies et proposées ?

Nous avons participé à la COP 21 et avec notre adhésion à l’association des Etats de la Caraïbe, l’environnement est un domaine d’action de la collectivité.

L’environnement n’est pas un sujet distinct, il est transversal. Lorsque des travaux de réfection et d’assainissement sont engagés, il s’agit aussi d’environnement.

Dans le programme FEDER nous avons mis un axe sur l’embellissement de notre environnement et sur le rattrapage structurel.

J’ajoute que dans le programme de « Continuons pour Saint-Martin », l’environnement tient une place prépondérante, avec des mesures phares comme la réorganisation du transport public, la protection des milieux naturels et la revalorisation et l’aménagement de nos salines, la lutte contre les gaspillages et les pollutions, le tri sélectif et la valorisation des déchets ménagers, l’aménagement de la baie de Cul de Sac.

10 / Tout le monde saccorde à dire quil faut un grand nettoyage de l’île. Ici, les ordures ménagères sont ramassées tous les jours, ce qui nest pas le cas ailleurs, même en outre-mer, dans un territoire aussi petit. Que doit-on mettre en place pour que l’île soit plus propre ?

Le civisme et l’attitude éco-citoyenne sont des valeurs qui contribuent au vivre ensemble. Le respect des règles est parfois difficile, et s’il fallait installer des brigades de contrôle derrière chaque poubelle, vous imaginez le nombre de personnes à mobiliser ! L’insertion professionnelle ne doit pas seulement servir à ramasser les ordures des autres. Tout le monde se doit se mobiliser.

Les écoles ont beaucoup sensibilisé les enfants sur ce point car les enfants ont une aptitude naturelle à relayer les informations auprès de leurs parents. De même les services de la collectivité, à chaque fois qu’ils ont été sollicités, ont su apporter leur aide pour la sensibilisation.

Le ramassage des gros déchets et des carcasses de voiture doit se poursuivre pour éviter les épidémies et améliorer la santé des citoyens. Les campagnes de sensibilisation ne suffisent pas. Il faudra qu’à travers chaque évènement, festival, carnaval, actions diverses, des chartes soient signées par les organisateurs pour véhiculer l’attitude citoyenne à adopter. Je crois beaucoup au travail partenarial dans ce domaine.

11/ Qui aimeriez-vous affronter au second tour le 26 mars ?

Ceux ou celui que la population aura permis d’accéder au second tour.

12/ Enfin, quelle question auriez-vous aimé que vous lon pose ?

J’aurais souhaité que l’on me demande qu’elles étaient mes contributions pour mon territoire autre que politique.

 

Pour télécharger notre entretien :

 

Nota bene : nous avons sollicité l'ensemble des candidats début février, au même moment (sauf Horace Whit  et Aline Hanson qui l'ont été au moment de leur déclaration de candidature courant février). Tous ont eu le temps qu'ils souhaitaient pour répondre aux questions. Deux n'ont toutefois pas apporté leurs réponses : Horace Whit tête de liste de Soualiga Movement sollicité le 17 février et Louis Mussington tête de liste du MJP sollicité le 6 février. Ce dernier nous a indiqué ne pas avoir eu le temps de répondre.

Estelle Gasnet