27.02.2017

Élections COM 2017 : entretien avec Alain Richardson, leader de En marche vers le progrès

Les élections territoriales pour désigner les 23 nouveaux membres du Conseil territorial de Saint-Martin auront lieu les dimanches 19 et 26 mars 2017. SoualigaPost a posé aux candidats douze questions identiques. Chaque jour, un entretien sera publié. Retrouvez aujourd’hui Alain Richardson, leader de En marche vers le progrès (MVP).

Comment se décide-t-on à se (re)présenter aux élections territoriales ?

En premier lieu le devoir de servir mon pays, porté par l’appel et les encouragements de mes concitoyens, en second lieu, la conviction forte que mon projet apporte les solutions concrètes et vérifiables qui permettront aux Saint-Martinois de croire en l’avenir.

Aujourd’hui, on parle beaucoup d’identité saint-martinoise, le Saint-Martinois ayant en effet le sentiment de l’avoir perdue. En tant que Saint-Martinois(e), partagez-vous ce constat ? Pensez-vous avoir perdu votre identité ?

Un peuple ne perd pas son identité, et donc non St-Martin n’a ni perdu son âme, ni ses valeurs fondatrices.  Le sentiment est peut-être celui de ne pas les retrouver chez tous ceux qui font le St-Martin d’aujourd’hui.

L’identité de St-Martin est construite sur des valeurs d’accueil, de tolérance, de partage, mais aussi de liberté,  d’esprit d’entreprendre et l’attache à la terre. Ceux qui ont rejoint ce territoire doivent embrasser ces valeurs, développer ce sentiment d’appartenance et l’expression « Saint-Martinois » ne doit plus être perçue comme synonyme d’exclusion.

La société saint-martinoise est en danger et ses fondations chancellent, mais si nous apportons nos solutions et construisons notre citoyenneté, St-Martin réussira durablement.

Depuis plusieurs mois, certaines pensées peuvent être très nationalistes. Alors qu’en métropole, on dénonce ce genre d’idées en y voyant un danger pour la société, ici on aurait tendance à les entretenir. Selon vous, est-ce moins dangereux localement ?

Le contexte de crise ou de difficultés personnelles conduit parfois au rejet de l’autre. Le vivre ensemble est menacé par les réflexes communautaristes et l’intolérance. Pourtant, St-Martin s’est construit sur le partage, l’accueil et sur la diversité.

J’affirme haut et fort que tous ici à Saint-Martin, nous nous épanouirons économiquement et socialement que si nous cultivons les valeurs de citoyenneté, de partage, de conquête et que si nous agissons tous pour l’intérêt et le bien commun (the « greater good »).

Nous tirons notre force de notre diversité et avec le programme que nous proposons, nous ferons de celle-ci, une vraie richesse pour l’ensemble de la population Saint-Martinoise.

Le chantier qui est devant nous tous est celui de bâtir un St-Martin, plus harmonieux, plus apaisé, plus solidaire, plus responsable, plus prospère et plus riche. Un St-Martin fier de ses origines mais riche de sa diversité.

On entend toujours que le développement économique doit être une priorité parce qu’il va permettre de créer des emplois, de la richesse, etc. Bien que la fiscalité soit attractive, rare sont les investisseurs intéressés à venir à Saint-Martin. Au regard des chiffres du chômage, toutes les actions menées jusqu’à aujourd’hui ont été un échec. Si vous êtes élu en mars, quels dispositifs allez-vous mettre en place pour créer des emplois ? Avec quel objectif ?

L’objectif à poursuivre obligatoirement pour notre territoire et c’est d’ailleurs celui fixé par mon équipe, En marche vers le progrès, est de doubler le niveau de création de richesse (le PIB) dans les 10 années à venir. St-Martin, n’a pas d’autre choix.

Il s’agit très rapidement de redonner confiance aux acteurs économiques par des mesures fortes et concrètes pour solidifier et consolider le tissu économique actuel. Cela aura pour effet de donner une bouffée d’oxygène à nos entreprises. A nous d’identifier avec le monde économique  tous les projets d’investissement et/ou de développement  actuels et de mettre en place les dispositifs nécessaires pour qu’ils deviennent rapidement une réalité.

Parallèlement la réalisation des équipements structurants indispensables sera mise sur les rails (port, accueil de la croisière, plaisance, réseau routier, aéroport, etc..), tout comme le chantier de la formation avec pour objectif, la création d’emplois et d’entreprises.

Par ailleurs, de nouveaux investisseurs seront fortement encouragés à venir s’installer grâce aux mesures destinées à rendre notre territoire, « investor friendly », compétitif et attractif.

En matière d’emploi plus précisément, nombreux sont ceux, dont vous, qui veulent donner la priorité aux Saint-Martinois. Ce qui peut sembler juste mais il faut être réaliste et admettre qu’il y a un manque de compétences localement, notamment pour les postes d’encadrement. Comment, selon vous, est-il possible d’y remédier ? Comment peut-on former les jeunes et moins jeunes (salariés durant leur carrière pour qu’ils puissent évoluer) sur le territoire ?

Chaque année, des dizaines de jeunes quittent le territoire pour poursuivre leurs études ou pour trouver du travail. Ces jeunes forment un vivier qui serait utile au développement et à l’économie de St-Martin y compris dans l’encadrement. Il faut pour cela leur donner envie de revenir en leur offrant la possibilité de devenir leur propre patron. Ou alors leur permettre de postuler en tant que cadre au sein de grandes entreprises que nous souhaitons accueillir sur notre territoire via des mesures fiscales intéressantes.

Nous proposons également de remettre en place et à l’ordre du jour, certains dispositifs comme le RSMA, qui a démontré son efficacité ainsi que la formation continue car des fonds sont collectés en ce sens par les organismes. Il ne faut pas oublier l’implication importante et nécessaire de l’éducation nationale qui doit offrir réactivité et adaptabilité mais aussi dans le cadre de son organisation sur le territoire un enseignement et des formations (y compris supérieurs) souples, polyvalentes et adaptées aux besoins réels du monde économique et social local.

L’Etat sera à nouveau sollicité pour financer et encadrer -comme cela a été réalisé au profit d’autres territoires : Nouvelle Calédonie, etc.- un plan de formation et de perfectionnement d’un volant d’une cinquantaine de cadres dans les métiers tant du secteur privé que public afin de doter notre territoire de ce que l’on appelle une technostructure.

En matière d’éducation, le constat dressé depuis plusieurs années est alarmant : le niveau est très bas. Pour plusieurs raisons : problème au niveau de la langue, manque d’implication des parents dans la scolarité de leurs enfants, etc. Selon vous, quel est le premier frein à la réussite de nos enfants ? Et comment peut-on le lever ?

L’engagement des parents et leur investissement dans l’éducation de leurs enfants est capital. L’école des parents pour former, assister et accompagner les parents dans leur rôle auprès de leurs enfants est une institution nécessaire en ce sens.

Il est important également de favoriser la scolarisation des enfants dès leur plus jeune âge car la mission de l’école est celle de permettre l’éveil intellectuel, l’expression, la créativité, la sociabilité. Ne souhaitant pas arracher l’enfant à son milieu linguistique d’origine, il faudrait un corps enseignant formé à nos spécificités et pour partie issu du bassin.

Nous proposons également d’impliquer les partenaires associatifs y compris dans les quartiers, pour accompagner les enfants dans la réussite.

Concernant l’aménagement de la baie de Marigot, le projet de la majorité actuelle semble ne pas avoir attiré de nombreux investisseurs. Certains en ont déjà tiré les leçons et veulent un projet à plus petite échelle. Quelle est votre position sur cet aménagement ?

Il est indispensable de rester cohérent et d’éviter des projets qui ne sont pas réalistes.

L’accueil de la croisière et de la plaisance est un équipement structurant indispensable au développement de notre territoire. Le secteur de la croisière et de la plaisance qui connait depuis des décennies dans la zone une croissance exponentielle représente une manne financière qui pourrait nous apporter une clientèle à fort pouvoir d’achat, sans avoir à créer une nouvelle ville et sans ouvrir le champ à de la spéculation immobilière.

Nous pouvons donc prévoir ces projets tout en restant réalistes, notamment par la mise en place de partenariats publics et privés avec des opérateurs professionnels et des exploitants de bateaux de croisière. Oui, il faudra un engagement financier public pour faciliter la réalisation des travaux ne pouvant être rentabilisés dans des délais raisonnables par le secteur privé (dragage, protection).

En matière fiscale, il est difficile pour la Collectivité de recouvrer l’ensemble des impôts. Il est aussi difficile pour les contribuables de s’acquitter de l’impôt et autres taxes alors que durant des années, ils ne le faisaient pas. Les impayés ont rapporté plus de 20 millions d’euros l’an passé à la COM. Comment selon vous le système peut-il être plus performant ? Doit-on supprimer des taxes ? Baisser le taux de certaines pour inciter la population à les payer ?

Oui il se pose sur notre territoire un problème de civisme et de discipline fiscale. Les difficultés économiques qui perdurent ne contribuent nullement à améliorer cette situation. Pourtant payer ses impôts et taxes est un mal nécessaire (philosophie bien acceptée par nos ainés).

Le système deviendra plus performant en établissant le bon niveau d’équilibre entre responsabilité, justice fiscale, efficacité, flexibilité, pérennité des recettes et rendement fiscal. Nous pensons que dans le cadre de notre collectivité, l’équilibre optimal doit s’établir à 65 à 70 % de recettes fiscales provenant d’une fiscalité indirecte et 30 à 35 % de directe. Nous favoriserons des modalités plus intéressantes pour le contribuable (prélèvement à la source, mensualisation, échelonnement). Nous supprimerons définitivement la suspicion de mauvaise foi et même de malhonnêteté que l’Administration fiscale porte trop systématiquement à l’encontre des contribuables. Oui nous redéfinirons la relation, le degré de confiance et le respect devant exister à l’encontre des contribuables. Une charte des contribuables, protégera le contribuable de la force trop souvent aveugle de l’Administration. Nous savons que le territoire a besoin d’une bouffée d’oxygène et de signes forts que la Collectivité est consciente des efforts et sacrifices réalisés par les consommateurs, contribuables et les entreprises depuis 2012 pour aider à sortir le territoire de ses difficultés budgétaires et financières. Aux affaires en 2017, la majorité En marche vers le progrès simplifiera la fiscalité, l’allégera par des suppressions et réductions de taux, d’impôts et de taxes. L’objectif est clairement d’utiliser l’outil fiscal pour rendre notre tissu économique plus compétitif et notre territoire « investors friendly » pour devenir plus attractif.

Depuis plusieurs années, l’écologie et d’une manière plus large l’environnement, prend une place de plus en plus importante dans le débat politique national et international. Il y a eu les Grenelles de l’Environnement, puis récemment les Cop 21 et 22. Ici, à Saint-Martin, c’est un sujet absent des débats. Ne pensez-vous pas pourtant que l’environnement devrait être le dénominateur commun à toutes les actions réfléchies et proposées ?

Notre réalité insulaire et notre vulnérabilité de plus en plus marquée par les aléas climatiques sont autant d’éléments qui nous rappellent régulièrement que l’environnement doit être au cœur de nos préoccupations et de nos politiques.

Nous pensons que le choix sociétal ne se situe nullement entre soit l’environnement soit le développement économique et humain, mais que oui le développement doit se faire dans le respect de l’environnement.

L’engagement pour la protection, la préservation et la mise en valeur de notre patrimoine environnemental doivent commencer dès l’enfance. L’intégration dans les programmes scolaires du sujet doit devenir une réalité.

Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut un grand nettoyage de l’île. Ici, les ordures ménagères sont ramassées tous les jours, ce qui n’est pas le cas ailleurs, même en outre-mer, dans un territoire aussi petit. Que doit-on mettre en place pour que l’île soit plus propre ?

La propreté de notre territoire commence par une prise de conscience de la part de la population. Notre qualité de vie mais aussi la qualité d’accueil de nos touristes dépendent  grandement de la propreté et de l’embellissement de notre environnement.

Nous mettrons en place le développement du tri sélectif pour une meilleure valorisation de nos ordures ce qui offrira des opportunités d’emplois, mais aussi des revenus à la Collectivité.

Il est manifeste que la répression et donc des sanctions doivent être mises en place envers les contrevenants. Nous disposons d’un système de vidéo protection sur le territoire et donc l’utilisation de cet outil pourrait s’avérer très utile avec le renforcement du rôle de la police (police de l’environnement).

Qui aimeriez-vous affronter au second tour le 26 mars ?

Moi-même.

Enfin, quelle question auriez-vous aimé que vous l’on pose ?

Je suis transparent et donc je reste ouvert à toutes les questions.

 

Téléchargez l'entretien : 

Estelle Gasnet