08.10.2021

Accusé d'avoir braqué une supérette, un jeune de 19 ans a été relaxé

Le 12 juin dernier aux alentours de 10 heures, un individu portant une cagoule et des gants entre dans une supérette à Quartier d’Orléans. Il brandit une arme, tend une sorte de pochette et somme le caissier d’y placer l’argent, soit une centaine de dollars et d’euros. Puis ressort.

Les gendarmes arrivent quelques minutes plus tard. Deux témoins leur indiquent avoir vu une voiture partir vers la partie hollandaise. Ils leur communiquent également la couleur, le modèle et la plaque d’immatriculation. Ils précisent que MP a l’habitude de la conduire. Une alerte est lancée auprès de la police de Sint Maarten. Les gendarmes effectuent des relevés autour de la supérette et vont découvrir dans un chemin un billet de 5 dollars, un autre de 5 dollars ainsi qu’un chapeau.

En début d’après-midi, la police de Sint Maarten retrouve ladite voiture et contrôle son conducteur, il s’agit de MP. L’identité correspond à celle fournie par les témoins. Le jeune âgé de 19 ans est interpellé et placé en garde à vue. Il a été placé en détention provisoire le 5 octobre et convoqué devant le tribunal de proximité de Saint-Martin en comparution immédiate mercredi. Il est accusé de vol avec menace d’un pistolet, en réunion et en ayant dissimulé son visage. Assisté de maître Noémie Chiche-Maizener, il a accepté d’être jugé ; il avait la possibilité de demander un délai pour préparer sa défense.

Si durant ses auditions, «il a dit tout et n’importe quoi» note le tribunal, à la barre, MP est constant dans ses explications : il n’a pas braqué la supérette. Il a raconté que ce jour-ci il a reçu la visite de F, une connaissance, et qu’il lui a prêté sa voiture. Sous entendant ainsi que F l’a utilisée pour se rendre à la supérette et commettre le vol. Il confirme qu’il a l’habitude de conduire le véhicule et de se rendre régulièrement dans le secteur où se trouve la supérette car son père y possède un conteneur.

Autre élément qui a orienté l’enquête vers MP est le chapeau retrouvé dans le chemin. Il appartenait à l’oncle de MP. Le jeune homme l’a confirmé et a expliqué qu’il y tenait beaucoup, car c’était un souvenir de son oncle décédé.

Au cours de sa garde à vue, MP demande à sa mère d’emmener à la gendarmerie F. Ce dernier, âgé de 17 ans, est entendu (mais fait l’objet d’une autre procédure car il est mineur). F explique que MP l’a conduit à l’épicerie et lui a demandé de la braquer. Qu’il lui a fourni l’arme, la cagoule, le chapeau, etc. Et que plus tard il lui a donné 70 dollars.

MP dément. «Pourquoi F mentirait ? », lui demande à plusieurs reprises le tribunal, perplexe, d’autant plus que MP a confié que sa famille aidait souvent le mineur. «Pourquoi quelqu’un que vous aidez, vous impliquerait dans le vol ?», répète la présidente du tribunal. MP n’a pas de réponse. «Je sais pas». Le magistrat insiste à plusieurs reprises : «c’est le moment de dire la vérité… C’est le moment de dire si oui ou non vous étiez dans la voiture ». A chaque fois, MP répond par la négative.

Dès le début de l’instruction de l’affaire par le tribunal, un élément avancé par la victime, a permis de suggérer que MP pouvait se trouver dans la voiture mais qu’il n’était pas celui qui est entré dans l’épicerie. A la barre, le gérant du commerce, un ressortissant chinois, a en effet raconté la scène du braquage et décrit son agresseur : «il était musclé… Lui (dit-il en regardant MP), il est maigre, l’autre il était gros». Le gérant affirme que MP n’était pas celui qui l’a braqué.

Pour la défense de son client, maître Chiche-Maizener a insisté sur ses qualités humaines. «Il a deux sœurs de 8 et 13 ans et il est un modèle pour elle. Il n’a pas pu utiliser le chapeau de son oncle car c’était un souvenir auquel il tient beaucoup… », a-t-elle confié en demandant à son client de montrer ses tatouages à l’effigie de sa famille.

MP n’a pas de casier judiciaire, en revanche F a été impliqué dans cinq vols à main armée en partie hollandaise et sortait de prison au moment du braquage de la supérette à Quartier.

L’enquête sociale a révélé que MP voulait aller aux Pays-Bas suivre une formation, qu’il faisait des jobs pour gagner de l’argent, qu’il avait arrêter l’école tôt car sa mère était partie à cette époque et que son père ne voulait pas l’emmener à l’école. En fin d’audience, il n’a pas retenu ses larmes. Ni sa mère venue le soutenir.

Après en avoir délibéré, le tribunal a relaxé MP.

Estelle Gasnet