03.09.2020

Il n’accepte pas l’homosexualité de son frère

Il a été condamné à 10 mois de prison dont quatre ferme pour avoir menacé son frère et commis des violences en raison de l'orientation sexuelle de son frère.

Il était sorti de prison le 15 mai dernier après avoir purgé une peine de dix-huit mois pour violences avec arme. YT, âgé de vingt-cinq ans, est de nouveau incarcéré en Guadeloupe depuis mercredi soir pour une période de quatre mois. Plus tôt dans la journée, il a été jugé en comparution immédiate par le tribunal de proximité de Saint-Martin et reconnu coupable de menaces de mort et violences avec arme sur ses deux frères (J et T) et sa mère, au motif que l’un de ses frères (T) est homosexuel.

Fin juillet, ce dernier fait son coming out auprès de sa famille. YT ne l’accepte pas. Une première dispute éclate au sein de la famille. Puis, fin août, le 28, YT réitère ses menaces. «Si je te vois avec un homme, je vais te tuer… Je vais te tuer pendant ton sommeil», lui dit-il. YT saisit un objet et le lance au visage de son frère. Puis va prendre des couteaux et menacer l’ensemble de la famille. Le troisième frère, J, reçoit des coups de bâton en essayant de s’interposer. Devinant que les gendarmes seront avertis, YD lâche : «je reviendrai vous tuer après ma libération…»

Ensuite, T se rend à la gendarmerie pour rapporter les faits et déposer plainte à l’encontre de son frère. YT est placé en garde à vue puis en détention provisoire dans l’attente d’être présenté devant le tribunal.

Dans le box des accusés, YT est tendu. Il a du mal à s’exprimer, parle peu. Acquiesce en faisant signe de la tête. Il reconnaît ne pas supporter l’homosexualité de son frère mais refuse d’en préciser les raisons. Lorsque son frère, T, est appelé à la barre pour témoigner, YD ferme les yeux. Il tremble. Il est nerveux. Lorsque sa mère est appelée à son tour, elle a tout juste le temps de répondre à la première question des juges que YT frappe très fortement sa tête contre la vitre du box. YT s’allonge sur les chaises, est entouré des gendarmes qui essaient de le calmer. L’audience est aussitôt suspendue. Les pompiers sont appelés. YT est évacué et transporté à l’hôpital pour être examiné.

Durant ce temps, la mère et ses deux autres fils patientent dans le palais de justice.

Les magistrats examinent deux autres affaires puis reprennent celle-ci au retour de YT au tribunal. La tension est encore grande. Le parquet demande aux gendarmes de le laisser menotté.

La mère revient à la barre et livre un bref témoignage confirmant des violences au sein de son foyer depuis que T a révélé son homosexualité.

«L’orientation sexuelle est une liberté dans notre société. Un homme a le droit d’être avec un homme, une femme avec une femme», confirme le vice-procureur en préambule de ses réquisitions. «La société est progressiste avec ceux qui accompagnent ce progrès», répondra ensuite l’avocat de la défense pendant sa plaidoirie. «C’est difficile de ne pas être insensible à ce qui s’est passé durant cette audience… C’est un geste d’une très grande détresse », commente-t-il. «C’est un individu qui a reçu peu d’amour, peu d’éducation, peu de fibre paternelle, et qui se retrouve donc facilement entièrement coupable, condamnable, et à qui on demande de réfléchir», a déclaré le conseil qui «a envie de croire en lui ». «Il a su montrer qu’il pouvait s’insérer : il a travaillé dans plusieurs entreprises et associations humanitaires », précise le conseil.

Après en avoir délibéré, le tribunal rend son jugement conforme aux réquisitions du parquet : YT est condamné à une peine de dix mois de prison dont six assortis d’un sursis probatoire durant deux ans comportant l’obligation de se soigner et de travailler. Il lui est aussi interdit d’entrer en contact avec ses frères et sa mère et de détenir une arme pendant cinq ans. Son maintien en détention a aussi été prononcé.

A la lecture du délibéré, YT a hurlé, mis des coups dans des chaises.

Estelle Gasnet