17.09.2018

Evasan : l'hôpital doit indemniser la TAI à hauteur de 100 000 euros

La bataille judiciaire entre l'hôpital et la société Transports Aériens Intercaraïbes relative à la dénonciation du contrat d'Evasan, semble toucher à sa fin. La cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu un nouveau jugement en faveur du CH.

Transports Aériens Intercaraïbes (TAI) avait été sélectionnée par le centre hospitalier Louis-Constant Fleming (CH) pour assurer les évacuations sanitaires. Le contrat avait été signé en février 2009 pour une durée de quarante-huit mois. Mais en juin 2011, le CH avait résilié le contrat pour «un motif d’intérêt général». TAI avait alors saisi la justice pour d’une part faire annuler la résiliation du contrat, d’autre part faire condamner le CH à lui verser une indemnité. Les deux affaires ont été examinées par le tribunal administratif de Saint-Martin  puis par la cour administrative d’appel de Bordeaux.

L’affaire de la dénonciation du contrat

Quelques mois après la dénonciation du contrat, la TAI a saisi le tribunal administratif pour faire annuler la décision de l’hôpital, sa requête a été rejetée. Aussi a-t-elle fait appel de ce premier jugement.

Brièvement, la TAI a entre autres soutenu que la décision de rompre le contrat avait été prise par la directrice par intérim alors qu’elle n’en avait pas le droit. Si la cour d’appel a effectivement considéré que cette personne n’avait pas les compétences pour le faire, elle a en revanche estimé que le «motif d’intérêt général» soutenu par l’hôpital était, lui, de «nature à justifier la résiliation du marché». A l’époque, les personnels médicaux participant aux évacuations sanitaires avaient fait remonter des «défaillances techniques» sur les avions et exprimé leur sentiment d’insécurité auprès de la direction. Celle-ci avait alors décidé de passer «un nouveau marché pour répondre à des critères plus précis exigés par les médecins en matière de climatisation et de pressurisation pour garantir la sécurité des patients et des équipes médicales», soit un motif d’intérêt général. En juin 2013, la cour administrative d’appel de Bordeaux avait rejeté la requête de la TAI.

L’affaire de l’indemnité

La TAI a ensuite saisi le tribunal administratif de Saint-Martin à qui elle a demandé de faire condamner le centre hospitalier à lui verser une indemnité au titre du manque gagner ; elle a fait valoir son incapacité à pouvoir continuer d’amortir les équipements acquis pour assurer les prestations sur une durée de 48 mois.

Elle a évalué le préjudice subi à 1 248 000 euros, soit 537 729 euros de frais directs, 357 158 euros de frais généraux, 417 866 euros de frais de remise en état des avions, 403 345 euros de perte sur le stock de pièces détachés et 735 360 euros au titre du préjudice d’image.

En 2015, deux jugements ont été rendus en sa faveur : l’hôpital a été condamné à lui verser la somme de 17 393 euros au titre des factures impayées durant la période du contrat exécuté ainsi qu’une indemnité de 1,55 million d’euros à titre de dommages et intérêts, somme qu’elle avait portée à 2,8 millions par la voie de l’appel incident. Cette fois-ci, c’est le centre hospitalier qui a fait appel des ces jugements qui ont été examinés en juin dernier par la cour administrative de Bordeaux.

Cette dernière considère que les dépenses qui ont été nécessaires aux prestations que la TAI a exécutées entre le début et la résiliation du contrat, sont bien dues, que le centre hospitalier n’avait pas, comme il le devait, fait état d’un décompte.

En revanche, la cour d’appel «[écarte] le droit à indemnisation de la société au titre du manque à gagner et des autres dépenses (frais généraux, loyers des avions) afférente à la période de vingt-deux mois allant de la résiliation du contrat jusqu'à la date initialement convenue de cessation des prestations ».

«Il ne résulte pas de l'instruction que ce stock [de pièces détachées] ne pouvait continuer à être amorti dans le cadre d'une activité de prestation de services ultérieure, ou faire l'objet d'une revente venant compenser une impossibilité d'amortissement», considère la cour d’appel. Elle suit le même raisonnement sur les frais de remise en état des avions : «ces appareils [auraient pu être] utilisés à l'occasion d'autres prestations effectuées ultérieurement ». De plus, le préjudice d’image n’a pas été établi.

La cour d’appel ne retient que la somme de 100 000 euros évaluée par le tribunal administratif de Saint-Martin correspondant au «coût d’acquisition du matériel nécessaire aux prestations de transports aériens prévues par le contrat».

Au final, le centre hospitalier Louis-Constant Fleming se retrouve à verser la somme de 100 000 euros à la société Transports Aériens Intercaraïbes qui demandait 1,5 million d’euros.

Précision au sujet du crash d’avion

L’avion de la TAI, qui s’était abîmé en mer le 5 mai 2012 juste après son décollage de Grand Case, et qui avait coûté la vie aux passagers (dont le pilote et le patient), avait été sollicité par l’assurance privée du patient dans le cadre d’une évacuation sanitaire vers la Martinique. L’Evasan ne s’était pas organisée dans le cadre d’un transfert de patient demandé par l’hôpital de Saint-Martin.

L’enquête du BEA (bureau d’étude de l’aviation) n’avait pas permis de déterminer les causes de l’accident. Trois hypothèses avaient été émises : défaillance du pilotage automatique, déplacement d’un passager qui a pu faire sortir l’avion de son domaine de vol et provoquer une perte de contrôle en tangage, l’incapacité du pilote à réagir rapidement lorsque l’avion a commencé à piquer du nez.

(photo d'archive)

 

Estelle Gasnet
2 commentaires

Commentaires

voilà une bien sage décision du Tribunal de Bordeaux
Il n’empêche que le marché actuel mériterait d'être regardé de plus près par le contrôle de la légalité et la répression des Fraudes...
Les avions sont-ils plus sures??? pas certains. La société qui les exploite ????

La décision est peut-être sage mais comment explique ton la différence d’appreciation Entre 1,5 millions d’euros et 100000 euros !
D’autre part effectivement il serait peut-être intéressant de vérifier certains éléments de l’appel d’offres en particulier les conditions de son attribution : 1.500.000 € de plus par an par rapport au contrat initial plus du double… pas mal l’arnaque.