22.02.2018

Recel de biens provenant du Beach Plaza : l’affaire examinée par la justice en l'absence de la prévenue

Ce dossier fait suite à un autre dossier, celui d’abus de bien social par Jérôme Flahault.

C’est une affaire vieille de près de trois ans qui trainait dans les tiroirs de la justice, celle d’abus de bien social dans le cadre du rachat de l’hôtel Beach Plaza en 2012 (devenu depuis le Beach) par Jérôme Flahault et Patrice Seguin. Elle a été enrôlée pour la première fois en juin 2015. Le mis en cause est Jérôme Flahault. Son associé Patrice Seguin (contre qui rien ne sera retenu) a porté plainte contre lui pour abus de bien social en juin 2013.

RAPPEL DES FAITS

L’année précédente, les deux hommes ont connaissance de la vente de l’hôtel le Beach Plaza suite au décès de son propriétaire. Ils s’y intéressent et décident de l’acheter. Jérome Flahault fait la une des journaux locaux pour présenter le projet qui s’élève à quelque 17 millions d’euros. Le projet est ambitieux mais est synonyme d’espoir pour l’économie française déjà en berne. Jérome Flahault affirme dans la presse que des fonds européens et d’autres aides publiques seront accordés.

Il s’avère par contre que les financements sont difficiles à obtenir auprès des banques malgré l’apport personnel de Patrice Seguin à hauteur de 2 millions d’euros. Jérome Flahault lui n’apporte rien mais assure pouvoir trouver des investisseurs aux Etats-Unis. Mais en vain.

Entre temps Patrice Seguin devient le directeur des trois sociétés devant permettre l’acquisition de l’établissement. C’est ainsi qu’il va s’apercevoir de mouvements de fonds suspects et injustifiés et déposer plainte.

«Cela ressemble davantage à de l’escroquerie», note toutefois le vice-procureur, Yves Paillard. Jérôme Flahault a fourni un télex d’une société américaine attestant le versement prochain de 12 millions de dollars sur le compte des sociétés pour acheter l’hôtel. «Le coup du télex pour justifier un prêt. C’est ce que l’on apprend en premier à l’école de police pour détecter les fausses garanties. Le télex présenté par Monsieur Flahault est bien évidemment une fausse garantie donnée par un David Hamilton et par une société qui n’existe pas», commente le vice-procureur Yves Paillard.

Les enquêteurs mènent durant plusieurs mois des investigations et procèdent à des vérifications. Jérôme Flahault sera poursuivi en justice. Il devait comparaître en juin 2015 mais l’affaire a été reportée en raison de problèmes de santé du président du tribunal. Puis en raison de problèmes de santé, cette fois, du prévenu. Des reports avaient aussi été accordés en raison de problèmes d’avocat ; le prévenu avait obtenu l’assistance d’un conseil via l’aide juridictionnelle et sa désignation avait tardé.

Atteint d’une grave maladie, Jérôme Flahault est décédé en novembre 2016 sans avoir été jugé. L’action publique à son encontre a été éteinte.

AFFAIRE DE RECEL

En revanche ne l’a pas été celle visant son amie ou amante, Leva S. Cette dernière est poursuivie pour recel de biens. Après aussi plusieurs renvois, elle a été jugée ce jeudi par le tribunal correctionnel de Saint-Martin. Elle n’était toutefois pas présente, ni son avocat qui avait sollicité un ultime renvoi car il n’avait plus de nouvelles de sa cliente depuis Irma et envisageait de se désister de l’affaire.

Il lui est reproché d’avoir accepté un climatiseur d’un montant de 935 euros posé dans le bureau de son entreprise de décoration, d’avoir accepté la somme de 2 000 euros et celle de 650 euros pour payer son loyer personnel ainsi que du mobilier appartenant à l’hôtel alors qu’elle savait que tout cela était payé par la société qui exploitait le Beach Plaza.

A la barre du tribunal, Leva S. est présentée comme l’amante de Jérôme Flahault, même si elle le nie. Elle l’a accompagné aux Etats-Unis lorsqu’il recherchait des investisseurs. Elle agissait à l’époque comme «consultante» et servait aussi «d’interprète car Jérôme Flahault ne parlait pas anglais». Selon l’enquête, elle avait été missionnée pour deux mois et devait percevoir la somme totale de 20 000 euros. Elle a cependant affirmé aux enquêteurs ne jamais avoir été payée. Le vice-procureur a précisé qu’elle n’était à cette époque pas déclarée non plus ; elle n’a déclaré son activité qu’en 2014 alors que les faits remontent à 2012 et 2013.

Concernant le mobilier, elle a avoué savoir qu’il appartenait à l’hôtel mais s’est justifié en disant qu’il n’avait «aucune valeur». «Lors de l’achat de l’hôtel, il n’avait pas été chiffré car il datait de plus de dix-huit ans», a-t-elle argué.

Leva S. nie l’ensemble des faits qui lui sont reprochés. Elle a refusé de signer les procès-verbaux de ses auditions par les gendarmes et a déposé plainte pour diffamation. «Elle estime qu’elle méritait tout ça car elle le valait bien», a commenté maître Montravers intervenant pour la partie civile (société qui exploite le Beach et gérée par Patrice Seguin) qui a demandé le remboursement des sommes, soit 935 + 650 + 2000 ainsi que 200 euros pour le mobilier.

Le vice-procureur a requis une peine de trois mois de prison avec sursis et une amende de 3 000 euros. Le jugement a été mis en délibéré. Il sera rendu le 22 mars prochain.

Estelle Gasnet