Le refus du RSA lui a causé des préjudices financier et moral
Après avoir vécu quatorze ans aux Etats-Unis, un Français est rentré en métropole en juin 2024 puis est venu, quelque mois plus tard, s'installer à Saint-Martin. Sans emploi, il a rapidement épuisé ses ressources financières. Il a fait une demande pour toucher le revenu de solidarité active (RSA) ; selon une estimation réalisée en ligne, il avait droit à 636 euros par mois.
Mais sa demande a été refusée par la caisse d'allocations familiales de Guadeloupe (CAF) car l'homme ne respectait pas certaines dispositions spécifiques imposées par la Collectivité de Saint-Martin. Il a alors formé un recours administratif auprès du président de la COM qui n'a pas donné suite. Aussi a-t-il saisi le tribunal administratif pour faire annuler cette décision de refus.
Il a été constaté que les dispositions sur lesquelles la CAF s'était basée pour motiver sa décision, avaient été annulées en 2017 par le Conseil d'Etat. La COM et la CAF «ne pouvaient ignorer l'illégalité des dispositions (…) et, par voie de conséquence, le refus de la Collectivité et de la caisse d'allocations familiales ne reposait sur aucun motif légal» déclare le tribunal. Ce refus «constituant une faute de nature à engager la responsabilité» de la COM, le tribunal a examiné la demande d'indemnisation au titre des préjudices financier et moral subis.
L'homme a montré qu'il s'était retrouvé dans l'incapacité à subvenir à ses propres moyens, à verser la pension alimentaire à la mère de sa fille pendant six mois. L'absence de ressources a généré un découvert bancaire, le blocage de sa carte bancaire, le non paiement de certaines factures. Sa situation est devenue extrêmement précaire. L'homme a choisi de quitter son appartement, de vendre sa voiture et ses affaires personnelles pour s'acheter un billet d'avion et rentrer en métropole en juin.
Toutefois, à la même période, en mai 2025, le juge des référés a suspendu la décision de la CAF. Cela a permis de régulariser la situation de l'homme et le versement de l'allocation qu'il aurait dû toucher dès sa demande en octobre 2024. Il a ainsi perçu un total de quelque 5 230 euros au titre du RSA entre octobre 2024 et juin 2025. Les premières sommes lui ont été versées après qu'il a décidé de quitter Saint-Martin et d'acheter son billet d'avion.Il a aussi expliqué au tribunal avoir acheté un billet non remboursable et non modifiable, car moins cher. Aussi n'a-t-il pu avancer son départ pour rentrer plus tôt suite au décès de sa mère.
«La faute de l'administration est la cause directe et certaine des préjudices financier et moral subis», estime le tribunal. L'homme est alors «en droit d'obtenir la condamnation de la collectivité à réparer les préjudices précités». Au vu de «la situation de précarité et de la détresse morale résultant de la décision illégale», le tribunal a confirmé le montant de 8 000 euros au titre de l'ensemble des préjudices. Il ne s'est pas prononcé sur l'annulation de la décision de refus puisque celle-ci a été suspendue entre temps.










