27.02.2025

Tirs sismiques pendant la période de reproduction des baleines, associations et sociétés de whale-watching réagissent

Une mission géologique utilisant des tirs sismiques est programmée dans les Petites Antilles, notamment dans les eaux françaises du sanctuaire Agoa des mammifères marins, du 1er mars au 20 avril. Une campagne qui intervient lors du pic de la période de reproduction des baleines à bosse.

Plusieurs associations environnementales ont appris début février la réalisation de cette campagne scientifique portée par l’Ifremer (GARANTI2-navire Atalante) qui a pour objet d’acquérir des connaissances sur la zone de subduction, à plus de 100 mètres de profondeur. Cette mission se déroulera depuis le Venezuela jusqu’aux îles Vierge Britanniques, et utilisera un procédé de tirs sismiques avec des canons à air comprimé (air guns Arrays), pour acquérir des données sur la nature des fonds marins.
L’action de l’Etat en mer, basée en Martinique, a examiné le dossier technique de cette campagne et le comité technique du sanctuaire Agoa a rendu un avis technique consultatif fin octobre 2024 en émettant des recommandations sur le protocole de mitigation via notamment la surveillance visuelle et acoustique. «Même si l’objectif de la mission en tant que tel est intéressant, sa période de réalisation est clairement mal choisie car elle correspond au pic de présence des baleines à bosse et des cachalots dans les eaux des Antilles» souligne Amandine Vaslet, responsable de l’antenne de Saint-Martin de l’association Mon Ecole, Ma Baleine.
«En effet, les mois de mars-avril sont ceux de la présence d’espèces de cétacés menacées et protégées à l’échelle Nationale (arrêté ministériel du 1er juillet 2011) qui viennent dans les eaux chaudes des Antilles durant leur période de reproduction. Il s’agit notamment de la baleine à bosse (classée vulnérable sur la liste rouge régionale 2021), présente de décembre à juin, et pour qui ces mois de mars/avril correspondent précisément au pic de présence, de reproduction et de mise-bas », précise Amandine Vaslet.

Il en va de même pour les cachalots, espèce protégée classée vulnérable sur la liste rouge l’IUCN et en danger à l’échelle des Petites Antilles. «Les tirs sismiques créeront de jour comme de nuit des explosions de niveau sonore de 238 dB. À partir de 224 dB, des modifications comportementales sont observées chez les cétacés et au-delà de 230 dB, cela induirait des modifications physiologiques» s’inquiètent les associations environnementales.
Malgré cette période peu propice pour les cétacés, la mission a néanmoins été approuvée par un arrêté préfectoral, le 13 janvier dernier, émanant du préfet de Martinique, qui assure la fonction de délégué du gouvernement pour l'action de l'Etat en mer sur l’ensemble de la ZEE des Antilles françaises.
En signe de protestation, plusieurs associations environnementales des Antilles françaises et des sociétés de whales watchers, ont écrit un courrier et l'ont adressé aux différents services de l’État ainsi qu’aux conseils scientifiques régionaux et au comité national du patrimoine naturel pour demander l’annulation de cet arrêté et la suspension de la mission. Dans cet objectif, un référé au tribunal administratif de Martinique a été déposé co-signé par plusieurs associations environnementales.
Par le passé, lors d’autres missions, il avait été signifié à l’Ifremer que la période de mars-avril était à éviter pour les campagnes de prospections sismiques afin d’assurer la quiétude des cétacés pendant leur période de reproduction.
Cyrile POCREAU