14.10.2016

Loi organique : les règles que la COM veut changer

Les élus du Conseil territorial ont approuvé certaines modifications.

Le changement de statut de Saint-Martin en 2007 s’est accompagné d’une loi spécifique afin de préciser les compétences de la nouvelle collectivité qui, pour rappel, obtenait en plus de ses compétences de communes celles de Région, Département. Il s’agit de la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer. Cette loi comprend plusieurs chapitres, un par collectivité, dont un pour Saint-Martin. Y sont énumérées et précisées toutes les règles de fonctionnement de la COM.

En 2013, Victorin Lurel – alors ministre des Outre-mer – avait proposé de modifier la loi afin d’améliorer certaines dispositions. En février 2014, une commission ad’hoc a ainsi été créée. Les travaux ont fait l’objet de multiples réunions et auditions de personnalités et institutions. Les élus ont été accompagnés par un maître de conférence en droit public, Pierre-Yves Chicot. Après deux ans et demi de travaux, la collectivité est prête à présenter au gouvernement une modification de la loi organique. Ces modifications ont été soumises au conseil territorial réuni en séance plénière le 13 octobre. Avec 16 voix pour, la proposition de révision a été adoptée. L’opposition (Team Daniel Gibbs) a voté contre. Elles seront transmises au gouvernement.

Nous revenons sur les principales modifications demandées à Paris.

♦ Dispositions générales

Il est proposé de modifier l’appellation et ainsi de dire «collectivité territoriale de Saint-Martin» et non plus collectivité d’outre-mer (COM) de Saint-Martin.

♦ Organisation institutionnelle de la Collectivité

- Il est demandé de mentionner que «la collectivité territoriale de Saint-Martin s’administre librement sur la base du principe de la séparation des organes démocratiquement désignés».

- Selon «une forte volonté des élus» de «conjuguer démocratie locale représentative et démocratie locale directe», il est suggéré que «la population [soit] associée à l’exercice des compétences de la collectivité territoriale de Saint-Martin».

- Aujourd’hui il existe un conseil territorial avec vingt-trois élus (dont un président et quatre vice-présidents) et un conseil exécutif qui comprend le président, les quatre vice-présidents et deux conseillers territoriaux. Demain, il est souhaité que ces deux organes soient totalement séparés. Il est suggéré que soient élues par les citoyens non plus vingt-trois personnes sur une liste mais trente-six. Neuf d’entre elles composeraient le conseil exécutif que l’on appellerait, «pour la symbolique», «gouvernement local». Elles exerceraient leur fonction «à temps plein» et ne pourraient siéger également au conseil territorial qui s’appellerait «assemblée territoriale» mais qui serait toujours composée de vingt-trois membres. Les deux organes auront aussi chacun un président.

- Il est proposé à ce que le conseil économique, social et culturel (CESC) dispose de l’autonomie financière. «Son président [serait] ordonnateur du budget

♦ Relations avec le représentant de l’État 

Bien qu’il y ait une préfecture à Marigot, tous les services de l’État ne sont pas représentés à Saint-Martin et certaines décisions dépendent encore de la Guadeloupe puisque la préfecture de Saint-Martin est sous l’autorité de la préfecture de Région de Guadeloupe. Ce qui n’est pas sans poser certaines difficultés. «L’efficacité de l’action publique n’est donc pas optimale. Il n’est [ainsi] pas pensable que Saint-Martin soit dépourvue d’une authentique représentation de l’État». Aussi est-il demandé l’installation d’une préfecture de plein exercice à Saint-Martin.

♦ Compensation financière

- Ce n’est qu’un «rappel», mais les élus ont estimé nécessaire de mentionner que «tout transfert de compétence donne lieu à une juste compensation financière équivalente». En outre, il est demandé que la dotation globale de compensation fasse l’objet d’une évaluation annuelle «afin de prendre en compte de la manière la plus précise qui soit, la différence entre les charges transférées et les recettes transférées».

- Les élus sollicitent par ailleurs l’autorisation de créer une nouvelle taxe qui serait similaire à la taxe de quai de Saint-Barthélemy. Seraient alors imposées les marchandises entrant sur la partie française. Les conditions d’application ne sont toutefois pas précisées.

- Aujourd’hui, les personnes qui habitent en partie française, ne paient des impôts sur les revenus que si elles y habitent depuis plus de cinq ans. Cette règle avait été établie afin de pas inciter des foyers à venir se domicilier à Saint-Martin où l’abattement de 40 % (30 % dans les DOM) pour payer moins d’impôts. Au final, cette règle désavantage la collectivité de Saint-Martin en la privant de recettes (notamment les impôts des fonctionnaires mutés et qui restent moins de cinq ans). Il est donc demandé de supprimer cette règle dite des cinq ans.

♦ Politique sanitaire

En raison de la forte demande sociale qui existe sur le territoire « dont l’origine souvent est le fait d’une immigration mal, peu ou pas du tout maîtrisée », il est demandé à ce que «les politiques sanitaire, sociale et familiale [fassent] l’objet d’adaptations nécessitées par la situation particulière du territoire».

♦ Politique économique

Aujourd’hui, la collectivité verse une dotation à la CCISM. Demain, il est demandé à ce que la CCISM «bénéficie d’une dotation annuelle versée par l’État pour toutes les actions qu’elle mène pour son compte».

- Afin de permettre l’accès au emploi à davantage de Saint-Martinois, il est proposé que «la politique de l’emploi à Saint-Martin [fasse] l’objet de dispositions particulières en vue de favoriser l’activité des personnes résidant sur le territoire de la collectivité».

Estelle Gasnet