20.02.2016

La SNSM a un nouveau "pacha"

Séances d'entraînement
Séances d'entraînement
Jean-Claude van Rymenant n’est plus le patron de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) de Saint-Martin. Désormais vice-président, il laisse sa place à Gilles Dubroca. Une passation de fonctions officialisée le 28 janvier dernier.

A 43 ans, Gilles Dubroca vient d’être nommé patron de la SNSM de Saint-Martin. « En Métropole on dit pacha », souligne l’entrepreneur installé sur l’île depuis 2007 parce qu’il avait « trop froid à Marseille ». Il est engagé au sein de la SNSM depuis huit ans : « pour sauver des vies, tout simplement. Ici, on est les seuls à intervenir en mer. »

La mer, il y a bien longtemps qu’il la connaît. Plongeur amateur, il possédait une société d’entretien de mécanique navale dans le Midi. Quant au sauvetage, c’est dans ses gênes. Fils d’un maître-nageur CRS, père d’une étudiante en médecine, il est lui-même ancien brancardier. Sa « cool attitude » revendiquée et sa propension à la rigolade cherchent à masquer un léger cynisme. Le détachement nécessaire de ceux qui en ont trop vu. Tout en mangeant, il raconte comment ses collègues ont repêché le corps d’un vieillard qui gisait dans l’eau depuis quelques jours et dont les membres se détachaient.

 

« Si y’a un problème, c’est tout pour moi. »

Diplômé SNB2 (plongeur corps) il était jusque-là formateur SNB1(nageur de bord) au sein de la SNSM. Nageur de bord s’oppose à simple canotier : « ce sont toutes les personnes présentes à bord que l’on peut autoriser à sauter pour sauver quelqu’un » explique-t-il. Sa promotion ? Si l’idée d’être désormais décideur l’enthousiasme, il nuance : « ça ne change pas grand-chose, je conduisais déjà le bateau (fonction réservée au patron et sous-patron, ndlr) ». Il n’est pas vraiment enchanté à l’idée de remplir les rapports. Et surtout, Gilles a conscience de l’énorme responsabilité qui lui incombe. La vie des sauveteurs et des victimes est désormais entre ses mains. « Si y’a un problème, c’est tout pour moi ».

Les 45 membres de la SNSM Saint-Martin (dont une vingtaine d’actifs) sont bénévoles. Ils n’ont pas d’horaires mais se rendent disponibles en fonction des appels d’urgence et de leurs obligations professionnelles. Dès qu’il y a un problème le CROSS Antilles-Guyane qui organise toutes les sorties en mer de la zone, contacte la station. « On est un peu comme des pompiers volontaires sauf qu’on n’est pas payés » rappelle le nouveau patron. Dans ces conditions, difficile de jongler entre vie familiale, professionnelle et engagement de sauveteur. Le secret ? En plus de la compréhension de son entourage, « il faut avoir un boulot qui offre beaucoup de temps libre ou être son propre patron, comme moi. Y’en a beaucoup qui ne s’imaginent pas le nombre de sorties en mer que l’on fait. »

 

Des interventions en tous genres

Malaises dus à l’alcool, à la chaleur ou à l’âge (beaucoup de personnes âgées vivent sur leur bateau), fautes d’inattention des novices de la mer, incendies, prises d’eau, navigateurs égarés… La SNSM intervient dans bien des domaines. Le plus beau sauvetage de Gilles Dubroca s’est déroulé à Tintamarre. « La victime devait peser 100 kilos, on était quatre à la porter. On a mis un brancard flottant et comme la vedette peut pas « beacher », on a dû la ramener à la nage sur 50 mètres » se souvient-il. Quant au pire ? La recherche d’un plongeur de nuit au Galion : « on était presque malades sur le bateau tellement la houle était forte. Et on ne l’a pas trouvé. Quelqu’un d’autre a découvert son corps le lendemain. On a dû passer à côté sans le voir. C’est terrible ça ».

Il l’a échappée belle une autre fois. Un pêcheur, tombé au large de son bateau en marche, est resté accroché à la bouée blanche de son casier pendant 24 heures. « Avec les outils de calcul on a estimé le lieu où il pouvait être. On est passé à 100 mètres de lui sans le voir. Heureusement, son frère est revenu avec nous pour nous indiquer l’endroit où ils pêchaient habituellement. Sinon, on ne l’aurait jamais retrouvé. » Pour garder le cap malgré toutes ces émotions, le sauveteur est catégorique : « le plus important, c’est d’aimer la mer. Sinon on ne reste pas. »

Fanny Fontan