30.06.2016

Les enjeux de la visite du ministre de la Justice à Saint-Martin

Le ministre de la Justice sera à Saint-Martin ce vendredi 1er juillet. Deux dossiers concentreront son attention : celui de la mise en place de la Chambre détachée et la question pénitentiaire.

Le 8 mai 2015, le président François Hollande avait annoncé la création d’une chambre détachée du tribunal de grande instance (TGI) de Basse-Terre à Saint-Martin. Même s’il s’était un peu avancé sur le calendrier (il avait programmé sa mise en fonction en janvier 2016), il a tenu cet engagement en mobilisant les équipes des ministères concernés. Ainsi le 30 décembre 2015 a été publié le décret portant la création de la chambre. Fin janvier, la directrice des services judiciaires était à Saint-Martin pour rencontrer les magistrats. Une délégation du conseil supérieur de la magistrature s’est rendue sur place quelques semaines plus tard. Et ce 1er juillet, c’est le Garde des Sceaux qui vient faire le point sur le chantier.

Jean-Jacques Urvoas connaît bien Saint-Martin et la problématique judiciaire puisqu’en 2014, alors qu’il était président de la commission des lois à l’Assemblée nationale, il avait diligenté une mission parlementaire d’information à la demande du député Daniel Gibbs et était venu procéder à des auditions sur place. Quelques jours après sa nomination place Vendôme, il avait de nouveau rencontré Daniel Gibbs et lui avait assuré de son soutien pour les projets concernant Saint-Martin.

«DONNER LES MOYENS À LA JUSTICE»

Le rapport rendu à l’issue de la mission parlementaire, avait mis en avant la nécessité de «donner les moyens à la justice de fonctionner correctement sur le territoire de Saint-Martin». Et suggéré «un renforcement du personnel du tribunal d’instance et l’établissement d’un substitut du procureur». Ce qui devrait se concrétiser avec la création de la chambre détachée. Des postes ont été créés et des appels à candidature lancés. Des précisions quant aux prises de fonction pourront être apportées demain par le ministre. De même qu’au niveau du calendrier.

Jusqu’alors plusieurs dates ont été avancées : si François Hollande avait déclaré une mise en fonction en janvier 2016, le parquet de Basse-Terre l’avait revue pour janvier 2017. Au vu de l’importance du chantier, il semble illusoire de voir la chambre détachée fonctionner d’ici à six mois. Les travaux n’ont pas encore débuté ; l’ancienne bibliothèque territoriale qui va accueillir la chambre venant d’être cédée par la Collectivité à l’Etat. Vendredi, l’architecte présentera le projet au ministre.

QUESTION PENITENTIAIRE

Second dossier sur lequel Jean-Jacques Urvoas est attendu, est celui d’une maison d’arrêt à Saint-Martin. Une table-ronde sur le thème pénitencier est prévue vendredi après-midi en préfecture entre élus et représentants du monde judiciaire.

Aujourd’hui, une centaine de Saint-Martinois est incarcérée en Guadeloupe. Au vu de leur nombre, l’intérêt de construire localement une prison – même en modulaire pour réduire les coûts - apparaît de plus en plus grand. L’idée est d’ailleurs fortement défendue. Daniel Gibbs avait rendu un rapport en ce sens à Christiane Taubira à la demande de celle-ci. Il avait aussi planché sur la question lors de la mission parlementaire. L’idée figure aussi parmi les revendications du comité Saint-Martin wake-up. Reste à voir dans quelles conditions elle peut se concrétiser. Autrement dit selon quels moyens.

Pour mémoire, le projet d’une maison d’arrêt à Saint-Martin avait déjà été lancé il y a une dizaine d’années puis abandonné pour des raisons financières. L'aménagement d'une construction modulaire transitoire avait aussi été étudié afin de permettre la tenue de comparutions immédiates à Saint-Martin. Mais cette option n’avait pas été retenue car trop coûteuse ; à l’époque, l’investissement initial avait été estimé à 500 000 euros pour deux cellules de deux à trois places sans compter un coût de fonctionnement annuel de 35 000 euros et la mise en place de sept à neufs agents. C’est pourquoi, pour que des comparutions immédiates puissent se faire, il avait été privilégié le transfert en Guadeloupe des personnes condamnées et escortées par des gendarmes, coûte à mobiliser des militaires. Cette option (qui n’a été mise en place qu’en 2012) avait été chiffrée en 2009 à quelque 126 200 euros par an.

Aujourd’hui, Jean-Jacques Urvoas est amené à plancher de nouveau sur la question. A devoir réfléchir à comment offrir de meilleures conditions de détention aux Saint-Martinois avec les faibles moyens financiers de la Chancellerie.

Le Garde des Sceaux est attendu ce vendredi à 11h30 au palais de justice.

Estelle Gasnet