23.06.2016

Dotation globale de compensation : comment comprendre l’affaire portée en justice par la COM

Le conseil constitutionnel doit se prononcer sur la conformité ou non à la Constitution française des modalités de calcul de la dotation globale de compensation octroyée par l’Etat à la Collectivité de Saint-Martin. Comprendre l’affaire en cinq questions ?

Qu’est ce que la dotation globale de compensation ?

Jusqu’en 2007, Saint-Martin était une commune intégrée au Département et à la Région de Guadeloupe. A ce titre, elle percevait des dotations de cette Région et de ce Département ainsi que des dotations de l’Etat au même titre que toutes les autres communes de France. Son passage en collectivité en 2007 a signifié que Saint-Martin obtenait l’ensemble de ces compétences : celles de Région et de Département en plus de celle de la commune.

Pour cela, il a été acté que pour exercer toutes ces compétences, l’Etat lui octroie les enveloppes budgétaires (ou dotations) correspondantes, autrement dit au lieu de les verser à la Région et au Département de la Guadeloupe comme il le faisait jusqu’en 2007, il doit le faire directement à la Collectivité de Saint-Martin.

Selon le code général des collectivités territoriales, il y a quatre instruments financiers de compensation : le transfert des impôts, la dotation globale de fonctionnement, la dotation globale de construction et d’équipements scolaires ainsi que la dotation globale de compensation (DGC). Le montant de celle-ci a été défini par la loi de finances rectificative de 2007.

Que conteste la Collectivité ?

La COM de Saint-Martin estime que les modalités de calcul de la DGC ne sont pas conformes à la Constitution française. Elle a ainsi posé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à laquelle le conseil constitutionnel doit répondre. L’audience publique s’est déroulée mardi 21 juin à Paris. Etaient notamment présents Aline Hanson, René-Jean Duret (conseiller territorial), David Girardot et Odile Vainqueur du pôle fiscalité ainsi que Thierry Gombs.

Quels sont ses arguments ?

«On doit constater que la dotation globale compensation n’a pas joué son rôle de variable d’ajustement en n’étant pas abondée à hauteur de l’octroi de mer qui finançait les charges de fonctionnement de la commune», a expliqué maître Marie-Yvonne Benjamin, le conseil de la COM lors de l’audience du conseil constitutionnel.

Sommairement, la COM soutient qu’elle ne perçoit plus la même dotation qu’elle recevait lorsqu’elle était commune. Précisément l’enveloppe correspondant à l’octroi de mer d’un montant annuel de quelque 11 millions d’euros. En effet, en tant que commune de Guadeloupe et la Guadeloupe appliquant l’octroi de mer, la commune de Saint-Martin était destinataire d’une partie de cette ressource qui couvrait ses «charges de fonctionnement». En 2007, il a été décidé que cette ressource lui serait versée en 2008 et 2009, le temps que la COM puisse s’organiser financièrement. Depuis, elle ne perçoit plus ces 11 millions annuels. Ce qu’elle dénonce.

Elle se base sur des textes du code général des collectivités territoriales et de la Constitution qui affirment «un transfert concomitant des ressources» et d’une «attribution de dotation équivalente à celle qui était consacrée» avant. Autrement dit, la COM estime qu’elle doit toujours percevoir ces 11 millions puisqu’au moment du passage en collectivité, la commune en était bénéficiaire.

Quels sont les arguments de l’Etat ?

En face, l’avocat du Premier ministre, maître Potier, a eu une interprétation différente des textes. Selon lui, la Constitution accorde des dotations compensatoires «lors de transfert de compétences entre l’Etat et une collectivité, et non lors de transfert d’une collectivité à une collectivité», ce qui était le cas de l’octroi de mer qui était une ressource locale. Il précise aussi que l’Etat doit certes compenser mais pas forcément à hauteur du montant total des dépenses.

Quelle sera la décision du conseil constitutionnel ?

L’affaire a été mise en délibérée par le président, Laurent Fabius. La décision sera rendue publique le 1er juillet prochain. S’en suivra la suite de la procédure juridique engagée par la COM depuis 2010 et les magistrats saisis devront tenir compte de la décision du conseil constitutionnel. Si la Collectivité obtient gain de cause, restera tout de même à voir dans quelle mesure l’Etat pourra abonder la dotation. Et il s’agira de voir si la décision est rétroactive ou non.

Estelle Gasnet