27.12.2023

Violences intrafamilales : un père de famille risque jusqu’à dix ans de prison

Une affaire de violences intrafamilales était présentée devant le tribunal de proximité de Saint-Martin vendredi dernier lors d’une comparution immédiate. S.L est accusé de menaces de mort avec réitération, envers sa conjointe. Il lui est également reproché des faits de violences sur son fils mineur. S.L avait déjà été condamné pour des faits similaires sur son fils le 7 décembre 2020 par le tribunal de Fort-de-France.

En début d’audience, dans le box des accusés, le prévenu a demandé en son droit le renvoi de son affaire afin de préparer sa défense avec son avocat maître Barreiro. Si l’affaire n’a pas été jugée sur le fond, elle a tout de même été évoquée afin que le tribunal puisse statuer sur la remise en liberté de celui-ci.

Le 15 décembre dernier, la gendarmerie est appelée à intervenir au domicile de S.L suite à des violences commises sur son fils mineur âgé de 16 ans. Aux alentours de 9h ce même jour, le fils se présente  en pleurs sur le lieu de travail de sa mère où il indique avoir été frappé par son père, «il présentait une trace sur la joue», décrit la juge. 

S.L est interpellé et placé en garde à vue après le dépôt de plainte de la mère au nom de son fils. Le mineur explique qu’à la suite d’une dispute avec son père le matin, ce dernier l’a insulté. Lorsque l’adolescent a décidé de se rendre dans sa chambre pour prendre ses affaires, son père l'a suivi, lui a porté un coup au visage et l'a poussé contre le mur. Une ITT de 1 jour est établie par le médecin. L’adolescent indique que les disputes sont récurrentes et une précédente scène de violence avait eu lieu, son père l’avait attrapé par le cou. 

Face aux gendarmes, le prévenu ne reconnaît pas les faits et le réaffirme au tribunal. «Je l’ai simplement bousculé en le poussant afin de pouvoir passer dans le couloir. De plus, mon fils a essayé de me frapper», indique-t-il. Cependant, il reconnaît a minima avoir proféré des violences verbales. Selon lui, tout ceci est une manipulation de la mère afin de le nuire. S.L est placé en garde à vue. À l’issue de sa remise en liberté, il a eu l’interdiction de se rendre au domicile familial. 

Pourtant, le 20 décembre la mère se présente de nouveau à la gendarmerie et dépose une seconde plainte contre le père de ses enfants car celui-ci aurait réitéré ses menaces. «Depuis que S.L a quitté le domicile familial, sa fille lui portait tous les jours des affaires», indique la juge. Lors de ces rencontres, l’individu menace de nouveau la mère de ses enfants par l’intermédiaire de sa fille.  «Il suffit de deux coups de fil et elle est morte», « elle mérite de crever cette chienne et d’être enterrée vivante » ou encore « vous allez tous le payer », adresse-t-il. 

Des mots contestés par S.L. «Je n’ai jamais menacé de mort directement, j’ai proféré des paroles mais elles n’étaient pas dirigées contre elle», dit-il. À l’issue de cette seconde garde à vue, S.L est déféré, tout en continuant à nier tous les faits qui lui sont reprochés. 

La vice-procureure qualifie l’individu comme un homme « incontrôlable ». En effet, selon elle, rien ne l’arrête et rien ne le fait entrer dans l’ordre, notamment en raison de la réitération des faits du 20 décembre. «Nous sommes sur un fonctionnement de violence habituelle dans cette famille telle, qu’on ne se rend même plus compte de celle-ci», déplore-t-elle. «Dans ses excès de colère, il peut commettre l’irréparable sur sa famille, jusqu’au jour où nous ne serons plus sur des faits de violences mais sur des faits bien plus graves», craint le ministère public. 

Pour le parquet, le risque de récidive du prévenu est établi, notamment au vu de son casier judiciaire, présentant plusieurs condamnations depuis 1998 pour des faits de stupéfiants, outrage contre une personne dépositaire de l’autorité publique, falsification, violences etc. Auprès des gendarmes, «il est dans ce discours de victimisation, il n’y a aucune remise en cause de sa part mais c’est plutôt la faute de sa femme qu’il lui fait perdre ses moyens». En ce sens, un mandat de dépôt est requis jusqu’à sa comparution. 

Du côté de la défense, maître Barreiro, défend la peine d’un homme après 24 ans de vie commune avec sa femme et les difficultés aujourd’hui de S.L pour se reconstruire. «La haine est probablement mal faite, je n’en disconviens pas, mais dans ce dossier il faudra avec exactitude remettre la place tout à chacun», déclare-t-il. 

Selon lui, la situation familiale est explosive des deux côtés, pour autant, «les obligations qui ont été posés à la suite de la garde a vue de mon client, ont été respectées». De ce fait, maître Barreiro plaide avec conviction le contrôle judiciaire à défaut du mandat de dépôt requis par le parquet. «Ne restez pas focaliser sur les antécédents de S.L, je vous demande de faire preuve de sagesse à son encontre et de proportionnalité au dossier car nous ne pouvons pas nous fonder sur des suppositions », convient-il. 

Après délibération, le tribunal décide de placer S.L en détention provisoire en raison de son état de récidive et au regard de ses propos tenus lors de l’enquête de personnalité. En outre, le tribunal veut garantir la présence du prévenu à la prochaine audience qui a « une tendance à ne pas s’y présenter ». 

L’affaire sera jugée le 10 janvier prochain par visio-conférence depuis la Guadeloupe où il a été incarcéré quelques heures aorès avoir quitté le palais de justice. Il encourt jusqu’à 10 ans d’emprisonnement. 

Siya TOURE