15.09.2017

Saint-Martin : crise diplomatique en pleine crise humanitaire

«C’est un ordre du Premier ministre», explique un militaire néerlandais aux automobilistes qui veulent passer la frontière et rejoindre la partie hollandaise. William Marlin, Premier ministre de Sint Maarten, a décidé sans aucune concertation avec les autorités françaises de fermer la frontière entre les deux parties de l’île. 'Nous n'avons eu qu'à constater", nous a-t-on confié côté français. C'est la blague que les médias locaux ont l'habitude de faire le 1er avril mais que personne ne croit car elle est très grosse. Aujourd'hui 15 septembre 2017, c'est pourant la réalité : on ne peut plus franchir la frontière.

Il y a quelques jours, William Marlin avait donné l’ordre de mettre de gros blocs de béton sur la route mais voyant que les voitures continuaient de passer, il a décidé de poser un conteneur de quarante pieds à la frontière à Cupecoy sécurisé par des militaires et la maréchaussée hollandaise et de poster à Bellevue des militaires. Ces derniers ont pour ordre de ne laisser passer que les personnes de nationalité hollandaise. Toutes les autres, y compris les Français résidant à Sint Maarten, ne sont pas autorisées passer. Que ce soit en voiture ou à pied.

À Cupecoy, les Hollandais ne peuvent franchir la frontière qu’à pied car le conteneur leur bloque la route.

Dix jours plus tôt, un ouragan de catégorie 5 ravageait l’île. Les deux parties étaient dévastées. Aujourd'hui, les autorités essaient tant bien que mal de coordonner les services et en pleine crise humanitaire et sanitaire, la préfète et le président du COM doivent consacrer de leur temps à gérer un problème d'ordre diplomatique.

À 19 heures, ils se sont entretenus avec leurs homologues de Sint Maarten mais les discussions ont abouti à un échec.

«Nous avons une petite fille de quatre ans dans la voiture, laissez nous passer à pied. Nous avons perdu notre maison en partie française et nous sommes hébergés chez un ami à 200 mètres derrière le conteneur », lance cette mère de famille à la maréchaussée. «Je comprends, j’ai moi aussi une fille de trois mais c’est un ordre du Premier ministre. C’est complètement stupide mais nous n’y pouvons rien», lui répond l’agent.

En fin d’après-midi à Bellevue, la tension commençait à grandir. «Demain nous devons interdire aux Hollandais de venir en partie française. Ils viennent tous les jours chez nous profiter des avantages sociaux français, du RSA, de la CAF, etc. », lâche énervée une Saint-Martinoise.

Cet après-midi, l’île de Saint-Martin surnommée la friendly island ne l’était plus. La population est prise en otage, prisonnière. La frontière est bloquée alors que nous sommes dans une situation sanitaire d’extrême urgence.

Estelle Gasnet
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