08.10.2018

CGSS et CAF : la cour des comptes constate un manque d'efficacité en outre-mer

La cour des comptes a publié en fin de semaine dernière son rapport sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale ; un chapitre est consacré aux CGSS des Antilles-Guyane dont le redressement est jugé «impératif ».

En 2017, les CGSS et CAF de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique  ont versé 6,2 milliards d’euros de prestations et encaissé 2,9 milliards d’euros de prélèvements sociaux.

En outre-mer, le fonctionnement des caisses générales de sécurité sociale (CGSS) est différent de celui de celles dans l’Hexagone. Alors qu’en France métropolitaine le service des différentes prestations sociales et le recouvrement des prélèvements sociaux sont confiés à des organismes locaux distincts, en outre-mer la sécurité sociale est organisée selon un modèle de caisse à vocation généraliste : une caisse générale de sécurité sociale (CGSS) recouvre l’ensemble des prélèvements sociaux et verse l’ensemble des prestations du régime général (assurance maladie-maternité, d’accidents du travail et de maladies professionnelles) et du régime agricole, à l’exception de celles relevant des CAF. Or, les CGSS ne proposent pas de guichet unique et sont organisées de manière cloisonnée.

Ce mode de fonctionnement est selon la cour des comptes «complexe» et explique en partie le manque d’efficacité alors que «le contexte économique et social [est] exigeant ». Aux Antilles-Guyane, «seule une personne sur deux y est en activité et le chômage y est deux fois plus élevé que la moyenne nationale. Le taux de pauvreté s’élève à 20 % aux Antilles et à 30 % en Guyane, pour une moyenne de 14 % en France métropolitaine», rappelle la cour des comptes.

«Alors qu’elles disposent de moyens importants pour exercer leurs missions, les performances de gestion des CGSS et, à un moindre degré, des CAF de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique présentent des faiblesses, parfois très significatives, sur des points déterminants d’appréciation de l’exercice de leurs missions », note la cour des comptes. Parmi ces points, le retard des versements des prestations, notamment de retraite.

«À la CGSS de la Guadeloupe, les retards de liquidation des pensions de retraite provoquent des ruptures de ressources. Plus d’un quart des pensions de droit propre et plus de la moitié de celles de réversion ne sont pas mises en paiement dans le mois suivant leur prise d’effet. Pour une pension de droit propre sur cinq, la date de prise d’effet est dépassée de plus de trois mois quand le premier paiement intervient. » Autre exemple, celui du versement des indemnités journalières, le délai de mise en paiement est de 60 jours en Guadeloupe, 71 jours en Guyane et 39,5 jours en Martinique. 85,1 % des pièces d’un dossier de minimas sociaux sont traités en moins de dix jours en Guadeloupe contre 97,1 % en Martinique ou 94 % en métropole.

La cour des comptes souligne que depuis 2016, les performances de la CGSS de Guadeloupe en matière de versement, se sont détériorés «sous l’effet de l’absentéisme et de départs en retraite tardivement remplacés».

«Plusieurs facteurs concourent à réduire la capacité de production des six caisses [CGSS et CAF] au regard des ressources humaines dont elles sont dotées », estime la cour des comptes. D’une part, «les fonctions support sont surdimensionnées au regard de celles de production. […] À la CAF de la Guadeloupe, 33 % des agents permanents sont affectés à des fonctions support, au regard de taux compris entre 12 et 31 % pour les autres CAF (et une moyenne nationale de 20,4 %).

D’autre part, le fort taux d’absentéisme et une grande réduction du temps de travail ont pour conséquence une «capacité de production amoindrie». «Suivant un usage local répandu, la plupart des caisses accordent des jours de congé au titre de fêtes locales au-delà des jours fériés légaux. La réduction du temps de travail qui en résulte peut atteindre jusqu’à 50 heures par an, soit l’équivalent de 53,4 ETP [équivalent temps plein] dans les trois CGSS et de 9,5 ETP à la CAF de la Guadeloupe », rapporte la cour des comptes. De plus «l’organisation du travail répartit de manière déséquilibrée les temps de production et réduit les temps d’échange et de coordination internes. Les agents ont la possibilité d’alterner des journées continues terminées en début d’après-midi et des journées classiques avec pause méridienne. Dans le cas général, des plages fixes de présence obligatoire au travail pour l’ensemble des agents sont prévues le matin et un ou deux après-midis par semaine ; à la CGSS de la Guyane et à la CAF de la Guadeloupe, il n’est pas prévu de plage fixe l’après-midi.» En outre, «l’absentéisme pour maladie est particulièrement élevé dans les CGSS et, dans une moindre mesure, dans les CAF. Il est ainsi supérieur de près de 60 % à la moyenne des CPAM dans les CGSS et de 20 % à la moyenne des CAF à la CAF de la Guadeloupe. Les journées non travaillées équivalaient en 2016 à près de 8 jours par an et par agent à la CGSS de la Guadeloupe et à 12 jours à celle de la Guyane», est-il constaté. «Les outils qui permettraient d’apprécier l’efficience de l’emploi des moyens des CGSS ne sont pas déployés ».

Enfin pour améliorer les performances des CGSS et CAF de Guadeloupe et donc le service public, la cour des comptes préconise de spécialiser les CGSS dans la gestion des prestations maladie-maternité et de retraite et de confier le recouvrement des prélèvements sociaux à une URSSAF interrégionale compétente pour la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique ; de développer les mutualisations d’activités ainsi que de revoir les organisations internes des organismes outre-mer pour renforcer leur capacité de production.

(crédit photo : cour des comptes)

Estelle Gasnet
2 commentaires

Commentaires

Encore un exemple de dépense publiques injustifiées.
donc un encadrement incompétent mais en sur effectif
Des agents qui prennent plus de congés que prévu par la loi
et des assurés qui pleurent leurs prestations.
Il faut centraliser la gestion de ces services en métropole pour récupérer le temps de travail nécessaire à la gestion de nos dossiers.
Localement, il n'y a plus d'accueil, tout se fait par Internet, autant etre gérer par des employés au travail plutôt qu'au lit!

Que ce soit aux Antilles ou en Métropole, le monopole de la sécu est en contradiction avec le droit européen. Ceux qui ne sont pas satisfaits peuvent choisir une autre solution pour leurs assurances santé et retraite.
http://www.claudereichman.com/mlps.htm